Comment cultiver votre résilience avec la méditation de pleine conscience

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Face aux (nombreuses) épreuves que vous traversons au cours d’une vie, certain(e)s d’entre nous rebondissent rapidement.

D’autres, hélas, ont plus de difficultés, voir n’y arrivent pas : ils ressassent, pestent contre les circonstances et le monde ou s’écroulent…

Qu’est-ce qui fait la différence ? C’est la résilience.

Ok mais la résilience, qu’est-ce que c’est ?

Et surtout comment développer la vôtre, si vous le jugez nécessaire ?

Grâce à cet article, vous allez tout savoir…

 

Au cœur de la tempête, une tempête émotionnelle

Nous vivons tous des périodes de crise au cours de nos vies. Certaines nous semblent interminables, tant les ennuis s’enchaînent.

Les années 2020 et 2021 constituent pour beaucoup d’entre nous ce genre de période.

Nous avons collectivement vécu une succession d’évènements aussi inattendus que difficiles : une pandémie, un confinement, un couvre-feu, un reconfinement…

Et certain-e-s ont vécu bien pire encore.

Tout cela a créé des changements radicaux dans nos situations, dans nos modes de vie, dans nos habitudes, et beaucoup stimulé notre vie émotionnelle.

Nous avons en effet pu ressentir :

  • La peur de la maladie et/ou de ses conséquences économiques, pour nous et nos proches ;

  • La colère face à la situation, aux mesures prises par les autorités ou aux comportements des autres que nous avons pu juger inadaptés ;

  • La tristesse, de se sentir isolé-e-s, de renoncer à des activités importantes pour notre équilibre, parfois aussi hélas d’être confronté-e au deuil ;

Pour certain-e-s d’entre nous, les plus résilient-e-s, ces émotions n’étaient que de passage.

Mais pour d’autres, hélas, elles se sont installées durablement et ont impacté leur bien-être psychologique, comme en témoigne cette étude de Santé Publique France menée lors du premier confinement.

Etude de Santé Publique France, premier confinement

Etude de Santé Publique France, premier confinement

Que tirer de tout cela ? Que certain-e-s (les plus résilient-e-s) ont de la chance et que les autres sont moins bien armés ?

Pas seulement. En effet la résilience, cela s’entraine…

 

Qu’est-ce que la résilience ?

Il existe plusieurs définitions de la résilience.

La plus connue en France est celle du psychiatre Boris Cyrulnik, pour qui la résilience est la capacité d’adaptation d’une personne suite à un traumatisme.

Dans cet article, j’ai retenu la définition du professeur Richard Davidson, le premier neuroscientifique à avoir eu l’idée d’étudier les cerveaux de pratiquants de méditation de pleine conscience comme le moine Matthieu Ricard.

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Pour lui la résilience est la capacité à revenir à un état émotionnel de base après une épreuve, que cette épreuve soit :

  • Terrible (« J'ai perdu mon job ») ou dérisoire (« J'ai mis deux euros dans la machine et les twix sont restés bloqués ») ;

  •  Déjà là (« J'ai le COVID ») ou anticipée (« En prenant les transports en commun je pourrais l'attraper »).

Elle peut être caractérisée par une courbe.

Pour les personnes plutôt résilientes, le retour à l'état émotionnel de base est rapide après le stimulus ou les stimuli qui provoque(nt) le “pic émotionnel”.

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Pour les personnes peu résilientes le retour à l'état émotionnel de base va être plus lent… ou ne jamais se produire.

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Quelle sont différences entre la résistance et la résilience ?

Beaucoup de gens confondent la résilience et la résistance mais elles sont très différentes.

Résister c'est mettre en place une stratégie pour combattre l'évènement, pour ne pas le laisser nous affecter.

Et parfois, cela dérive en un combat contre nos propres émotions.

Nous mettons en œuvre des stratégies pour les réprimer et/ou ne pas les ressentir. Des stratégies qui sont d’ailleurs souvent valorisées dans l’éducation que nous recevons.

Beaucoup de gens ont en effet tendance à :

  • Expliquer à un enfant qui est triste qu’il n’a pas de bonnes raisons pour l’être, que d’autres sont plus malheureux que lui, et que donc, il ne faut pas pleurer ;

  • Dire à un enfant qui a peur que c’est une poule mouillée et qu’il ne doit surtout pas le montrer ;

  • Fustiger le « mauvais caractère » d’un enfant qui est en colère, et lui intimer l’ordre de se calmer ou de lâcher-prise tout de suite.

Alors… ça marche à un certain niveau : on peut se convaincre que ses émotions sont inappropriées sur le plan intellectuel, finir par se conditionner à ne pas les exprimer, voir à ne pas les ressentir.

Mais cette stratégie d’inhibition est délétère à long terme.

Car ce n’est pas parce qu'on ne ressent plus ses émotions qu'elles ne sont plus là.

Au contraire, elles sont un peu comme la poussière qu'on met sous le tapis : elles restent et s’incrustent dans notre mental.

L'émotion devient alors une humeur, puis un tempérament.

Et malheureusement tout ça peut avoir des conséquences sur notre santé. Il est en effet prouvé que :

  • Les gens qui ont un tempérament colérique ont une probabilité plus forte de développer une maladie cardio-vasculaire ou de subir des accidents vasculaires cérébraux (AVC) ;

  • Celles et ceux qui ont un tempérament mélancolique ont de plus grandes chances de connaître la dépression ;

  • Les personnes anxieuses développent plus fréquemment des ulcères, des problèmes digestifs et des troubles cognitifs et neurologiques (notamment la maladie d'Alzheimer et la maladie de Parkinson).

La résilience, elle, repose sur une stratégie très différente qui consiste à prendre en compte l’émotion et à l’accueillir.

La fable de La Fontaine « Le chêne et le roseau » illustre parfaitement ces deux stratégies.

 

Les stratégies de résilience et de résistance expliquées par une fable

La fable met en scène un roseau et un chêne qui discutent de leur attitude face au vent (et oui, chez La Fontaine les animaux et les végétaux parlent !)

L’attitude du chêne c'est la résistance : il encaisse, « brave l’effort de la tempête », fait comme si le vent, finalement, ce n’était pas grand-chose

Attitude dont il s'enorgueillit puis qu'il dit au roseau

 
Le moindre vent, qui d’aventure
Fait rider la face de l’eau,
Vous oblige à baisser la tête :
Cependant que mon front, au Caucase pareil,
Non content d’arrêter les rayons du soleil,
Brave l’effort de la tempête.
— Jean de la Fontaine
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L'attitude du roseau, elle, c'est la résilience.

Il prend en compte la présence du vent et s'adapte : il baisse la tête.

La morale de l'histoire lui donne raison.

Car à un moment, un vent surgit, terrible.

Le roseau plie, mais ne rompt pas.

Le chêne, lui, finit déraciné.

Et c’est ça les limites de la résistance seule : au bout d’un moment, nous arrivons au bout de nos forces, et c’est la bérézina.

Il vaut donc mieux, surtout quand une épreuve dure ou que les emmerdes, comme le disait Audiard, « volent en escadrille », adopter la stratégie du roseau et faire preuve de résilience.

Bon… à ce stade de l’article, j’ai deux nouvelles à vous annoncer : une bonne et une mauvaise.

  • La mauvaise c'est que décider d’être plus résilient ne suffit pas !

  •  La bonne c'est que vous pouvez développer votre résilience grâce à la méditation de pleine conscience !

 

Qu’est-ce que la méditation de pleine conscience et pourquoi elle renforce la résilience ?

La méditation de pleine conscience est une pratique qui entraîne la capacité à porter attention délibérément à l’expérience présente, notamment aux sensations physiques qui accompagnent les émotions, avec une attitude de curiosité et de non jugement.

Davidson et ses confrères spécialistes des neurosciences ont pu démontrer qu’elle renforce la résilience grâce à l’imagerie médicale et aux IRM fonctionnels :

En effet ces appareils leur ont permis d’identifier deux choses :

1- La première est que plus il y a de signaux allant du cortex préfrontal vers les amygdales cérébrales, plus nous sommes résilients ;

cerveau  humain, fonction cognitive et circuits cérébraux
Le cortex préfrontal est la partie antérieure du cortex du lobe frontal du cerveau, située en avant des régions pré motrices. Elle est aussi la partie du cerveau la plus récente dans notre évolution et le siège de différentes fonctions cognitives dites supérieures, notamment l’attention, le langage, la mémoire de travail et la mémoire verbale, le raisonnement, et plus généralement les fonctions exécutives.

Les amygdales cérébrales sont quant à elles situées dans notre système limbique. Elles agissent comme un système d’alarme lorsque nous sommes confrontés à une menace ou à la perception d’une menace, et ont un rôle majeur dans l’apparition des émotions.

2- La deuxième est que la pratique de la méditation de pleine conscience renforce les connexions entre les neurones qui permettent à ces signaux de circuler.

 

Et si l’on y réfléchit bien, c’est logique.

Que font les personnes qui pratiquent la méditation de pleine conscience si ce n’est diriger avec leur cortex préfrontal leur attention sur les émotions qui naissent au niveau de l’amygdale cérébrale ?

Voilà encore une belle illustration de la neuroplasticité, cette propriété qui permet au cerveau et au système nerveux de transformer leurs structures et leurs fonctionnements en fonction des tâches qu'ils ont à accomplir.

 

Concrètement qu’est-ce qui change dans le comportement des gens ?

Pour répondre à cette question, je vous présente Sophie.

Sophie habite avec son conjoint dans un appartement agréable avec balcon.

Elle est confrontée à une double épreuve :

  • Il y a un virus dangereux qui traine ;

  • Et les autorités ont décidé que pour limiter sa propagation les personnes devaient rester confinées chez elles.

Un jour, en prenant son café, elle voit les deux fils de sa voisine sortir vers midi et rentrer tard le soir. Et elle remarque que ça se reproduit tous les jours.

Maintenant clonons Sophie (oui je peux tout faire, je suis l’auteur !)

  • Sophie 1 n’est pas trop le genre de personne qui fait attention à ses émotions et à ses pensées.

  • Sophie 2, elle, pratique la méditation et fait la démarche de les accueillir

 

Sophie 1

Sophie 1, en voyant ses jeunes voisins, commence par ressentir un profond agacement. Intérieurement, elle se dit :

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  • « c'est injuste, je reste confinée, je fais des efforts mais eux s'en foutent » ;

  • « Ces gamins nous mettent tous en danger » ;

Elle n’y fait pas trop attention, mais petit à petit sa colère monte.

Quand sa journée de télétravail est finie, pour se détendre machinalement elle allume la télé.

Elle voit alors, sur BFM, des images de gens qui comme ses voisins semblent moins respecter le confinement qu’elle ; des invités en plateau qui fustigent le manque de civisme des Français et critiquent l’ensembles des mesures prises par le gouvernement (sans s’aventurer à en proposer d’autres bien sûr).

Lorsque Sophie 1 éteindra sa télé certaines pensées auront fait leur nid en elle :

  • Que les gens dans leur ensemble respectent moins bien le confinement qu’elle et son conjoint ;

  • Que les français sont des attardés mentaux ;

  • Que ce confinement est tout simplement la pire mesure politique jamais prise sous la 5ème République.

En fait Sophie 1, sans le savoir, reste avec sa colère.

Toute la journée elle l’alimente, par les pensées qui surgissent à chaque fois qu’elle voit les deux enfants de sa voisine sortir et par les émissions qu’elle regarde;

Et à vrai dire, au bout d’un moment, le moindre évènement l’alimente ! Même la remarque la plus anodine de son conjoint. Car la colère de Sophie 1 influence la façon dont elle perçoit son quotidien.

Lorsqu’on dit de quelqu’un qu’il / elle voit rouge, c’est bien de ça dont on parle : l’émotion agit comme des verres teintés : on a l’impression que le monde a changé, alors que ce sont seulement les verres qui sont différents.

Et alors que Sophie 1 va bien, qu'elle a objectivement de bonnes conditions de confinement, avec son appartement agréable et son grand balcon, elle est tendue et dort mal, et s'engueule tous les jours avec son conjoint.

 

Sophie 2

Imaginons Sophie 2. C’est la même. Enfin, presque la même. Parce que Sophie 2 a commencé à pratiquer la méditation de pleine conscience plusieurs mois avant le début du confinement.

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Elle s’est notamment entrainée à être attentive à ses sensations corporelles, à ses émotions, à ses états mentaux et à ses pensées, et les perçoit maintenant dès qu’elles apparaissent.

Lorsqu’elle voit ses voisins sortir, la même colère s’invite

Mais toute suite, Sophie 2 s’en rend compte.  Elle la sent dans son corps, dans ses épaules et dans son front.

Et plutôt que de chercher à repousser ces sensations désagréables, Sophie 2 choisit de leur accorder toute son attention.

Elle fait preuve de curiosité (« Tiens, comment elle est cette tension dans mes épaules ? »).

Et elle fait la même chose avec ses pensées (« Tiens, je me dis que c'est injuste et que ces jeunes ne respectent pas les règles »).

Et alors qu’elle s'emploie à être pleinement consciente de ses expériences mentales et sensorielles, un espace se crée en elle et lui permet une certaine prise de recul.

Elle comprend alors que ses pensées sont peut-être influencées par la colère et par des biais cognitifs.

En effet, plusieurs hypothèses sont possibles pour expliquer que ses voisins sortent de l’immeuble tous les jours à midi.

C'est peut-être parce qu'ils manquent de civisme… Mais peut être aussi parce qu’ils effectuent un temps partiel pour remplacer les employés malades d’un magasin d’alimentation, ou parce qu’ils sont bénévoles pour aider les soignants du CHU d’à côté… 

Bref, Sophie 2 se rend compte qu'elle peut construire toutes les hypothèses du monde, mais qu'elle n'a pas de certitudes.

Et sa colère laisse place à la sérénité.

Ce jour là, elle n’allume la télé que 5 minutes et choisit France Info.

Elle a en effet bien remarqué que les reportages de BFM TV et les pseudos débats qui suivent sont susceptibles de remettre des buches dans le foyer de sa colère. Et elle n'en a pas envie.

Son confinement se passe bien, les interactions avec son conjoint se passent bien et elle dort comme un bébé. Elle n’a pas envie que ça change.

 

Conclusion

La résilience est essentielle en période de crise, nous en avons tous conscience.

Aujourd’hui, grâce à l’IRM fonctionnel et aux travaux de neuroscientifiques comme Richard Davidson, nous savons aussi que c’est une compétence que nous pouvons développer grâce à la méditation de pleine conscience.

La résilience est en effet caractérisée au niveau du cerveau par la quantité d’informations qui circulent entre notre cortex préfrontal et nos amygdales cérébrales.

Or la méditation de pleine conscience, lorsqu’elle est pratiquée avec assiduité et une attitude juste, renforce ces connexions. Et, ce faisant, elle nous aide à voir les évènements avec plus de discernement et à adapter notre comportement.

Et vous, vous-êtes vous reconnu-e dans Sophie 1 ou Sophie 2 ? Est-ce que vous pensez que la méditation de pleine conscience pourrait vous aider à développer plus de résilience ?